Face à la vague de soutiens apportés aux coups d'État sur le continent et particulièrement à celui intervenu au Niger, par une partie l'opinion africaine, je veux ce matin tenter de me convaincre aussi que ces situations déroutantes ont quelque chose d'acceptable, de souhaitable. Le théâtre nigérien m'intéresse spécialement. 

Je n'aime pas particulièrement sa gueule à BAZOUM mais il est le Président élu souverainement par les nigériens, il y a 2ans seulement. Et un matin, une bande de militaires, compte tenu de leur humeur du moment, prennent les armes, le séquestrent puis, entre eux, choisissent quelqu'un qu'ils proclament Président. Comment je m'explique qu'un tel acte est non seulement normal mais aussi émane de la volonté du peuple du Niger ? J'essaie mais je n'y arrive pas car c'est la majorité des nigériens qui ont donné à BAZOUM sa légitimité en l'élisant. Ceux qui par les armes ont pris le pouvoir tirent leur légitimité à eux de qui ? Du peuple ou de la bande de militaires qu'ils sont ? 

En soutenant une telle situation, n'est-on pas en train de consacrer la suprématie de la minorité qui avait perdu le pouvoir dans les urnes sur la majorité qui a élu le Président ? Parce que, entendons nous bien, ceux qu'on voit jubiler dans les rues de Niamey sont bien pour la plus part des gens qui sont en opposition à BAZOUM, donc en opposition aux millions de nigériens, la majorité silencieuse qui avaient voté pour lui. Toute chose qui est contraire, vous conviendrez avec moi, aux principes même de la démocratie. Or, n'est-ce pas nous qui proclamons partout notre attachement à la démocratie ? 

Si je dois moi souscrire qu'en démocratie, face aux divergences de point de vue, on peut recourir aux armes pour s'imposer, cela va sans dire que je cautionne l'idée qu'on puisse, quand j'ai des désaccords avec le député élu dans ma circonscription, le maire de ma commune, avec le secours de quelques amis policiers ou militaires, les chasser par la force des armes, pour prendre leur place. Chacun pourra reproduire le même schéma, continuellement. Est-ce dans ce modèle de société là que nous et nos enfants aimerions vivre? 

Cette voie, à mon sens, est plus porteuse d'inquiétude et d'incertitude que celle de la démocratie qui, avouons-le, même si elle n'est pas parfaite, offre tout de même aux citoyens le pouvoir de la sanction dans les urnes. Et d'ailleurs, si elle était parfaite la démocratie, nous ne verrions pas les tribulations et autres contestations populaires dans les pays qui en font l'expérience depuis plus longtemps que nous comme la France, les États-Unis... L'attaque contre le Capitole ou la crise des gilets jaunes ou de la réforme des retraites en sont des exemples parlants. Mais jamais dans aucun de ces pays, il ne passera pas par la tête des militaires de prendre les armes et d'arrêter l'ordre constitutionnel. Pourquoi ? Parce que chacun est dans son rôle. L'armée n'a pas vocation à gouverner un pays. Et si quelqu'un de l'armée se sent en mesure de relever des défis que d'autres n'ont pas l'audace d'accomplir, il démissionne, enlève sa tenue, dépose son arme, se porte candidat, gagne les élections. Il lui sera facile, je présume, de se faire élire Président puisqu'il incarnerait, comme on l'entend dans la foule hurlante, la volonté du peuple à mettre la France et ses bagages dehors. N'est-ce pas? 

Désolé, mais j'ai vraiment essayé de rentrer dans la logique de ceux qui soutiennent les coups d'État pour, comme eux, y voir de la pertinence. Hélas ! La raison me crie, obstinément : « c'est une connerie !». 

Bon début de semaine à chacun et à tous. 

Ganiou AGNIDE

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